Dans la tradition altogovéenne L’imposition du nom confère la personnalité et fait participer l’individu à l’essence de son clan.Vern fait revivre, garde vivante la mémoire de sa grand-Mère Germaine...Mais penchons-nous sur ce mariage assez particulier...
Vern peut et doit servir d'exemple à beaucoup de jeunes gabonaises. Elle est de mère Américaine et de père Gabonais et elle a décidé de se marier selon la tradition de son père de coutume bayumbu et ndassa. Tour à tour elle vécu des cérémonies telles que "Mignallou" ou " Ngouvou'yi'mballa" qui sont devenues rares de nos jours chez les bayumbus-ndassa. "Nzamba" (Dot en ndassa) a respecté les différentes étapes.
Vern a appris des pas du folklore Lissimbou...Elle est sortie en esquissant quelques pas ce qui a fait couler des larmes à beaucoup de personnes...
Sa tante paternelle ( Tante Marie) a été en quelque sorte sa marraine: elle l'a guidé avant même qu'elle n'arrive au Gabon. Elle a construit de ses mains la hutte des mariés comme il est de coutume au village. Elle n'a pas manqué de lui prodiguer les précieux conseils avant sa sortie. C'est elle qui lui ouvre " le chemin" Elle porte le banc symbole de la stabilité dans le foyer...
Les femmes entonnent un chant de réjouissances dans le folklore Lissimbou pour accompagner la future mariée. Les voix des femmes reprises en choeur par la famille perçaient la nuit et appelaient ceux restés là-bas dans les villages dans le Haut-Ogoué.
Vern est toute habillée de raphia comme les mariées du Haut-Ogoué. Le raphia pendant le mariage revêt plusieurs symboles au delà du simple vestimentaire...
J'ai entièrement réalisé la tenue traditionnelle de Vern à la main. J'ai voulu respecter la tradition.Le raphia dans ses cas se laisse faire.
Bien qu'ayant subit divers opérations de traitement, la fibre de raphia obtenue reste vivante. Lorsqu'on travaille le raphia, il est important de réaliser, d'informer la matière sur la finalité du travail... Les fibres de raphia deviennent malléables entre les mains lorsque la confiance s'est installée entre l'artisan, le styliste et le raphia... le raphia a besoin de confiance... Pour mener à bien sa création, il faut s'allier au raphia, c'est une matière vivante... il suffit de travailler le raphia pendant de longues années pour se rendre compte de la relation qui s'installe entre le créateur ou la créatrice et le raphia...
Vern porte le panier de portage ramené du village. Le panier de portage est le symbole de la richesse. Dans le panier il y a des boutures. Dans l'ancien temps, une femme emportait des boutures dans sa belle-famille. Une fois au village de son mari, une place lui était indiqué pour y faire son champ. Elle devait "produire" la richesse qui devait nourrir sa famille. Les boutures étaient les "graines" de sa richesse, la richesse qu'elle apportait dans son nouveau village. Tout comme le ventre de la femme est une richesse inestimable, la capacité à cultiver un champ est aussi une grande richesse, car la première nécessité de l'Homme est de se nourrir. Au jardin d'Eden Le Seigneur demanda à Adam et Eve de cultiver la terre, mais aussi de procréer.Notre coutume garde en mémoire cet épisode premier de la création ou tout n'est que symbole.
Le même panier avec un grand trou sert aussi à laisser tomber tout ce qui ne serait pas bénéfique pour la femme : injures de la belle-famille, mépris...La seule chose que la femme ne doit pas laisser tomber par le trou de son panier est son Coeur... Le Coeur de la Femme est le plaisir de Dieu et un lieu de secrets, le lieu ou s'exprime l'Amour et la Haine...en d'autres termes c'est le berceau de la dualité...
Vern est assise: elle n'est pas au pied de ses parents sous la tente de sa famille comme on a coutume de le voir lors des mariages. Elle est devant la hutte des mariés réalisée par tante Marie: elle doit réaliser qu'elle va quitter sa famille qui est sous la tente à sa gauche, pour rejoindre le village de son mari représenté par la tente à sa droite. Elle est seule à cet endroit à l'entrée de son foyer, de sa maison symbolisée par la hutte...Elle expérimente la solitude de la séparation avant l'entrée dans une autre famille. Le moment venu elle traversera et symboliquement, son époux et elle reviendront cette fois à l'entrée de la hutte: cela symbolisera le début de leur famille à tous les deux... Mais elle devait rester là, tête baissée à vivre ces instants magiques chargés de symboles.
-" Ta mariée a froid, Mireille, elle se sent seule!" M'a-t-on dit...
Vern était seule là, entre deux villages. Je me suis approché d'elle, je me suis penchée vers elle:
- " Vern tu as froid?"
-" Non!"
- " Tu es stressée? Tu as peur?"
-"Non! Ca va!"
Je n'étais pas rassurée car je me suis dit qu'elle voulait me rassurer! N'importe quelle femme assise à cette place aurait surement eu un pincement au coeur. Mais Vern est solide.Elle vivait ces instants de manière sereine...Et puis même si cela ne se voyait pas elle était enveloppée du pagne (Mikanda en bayumbu) que porte toute les mariées et symbolisé par la raphia qui couvre le corps bien au delà de ce que l'on peut imaginer.
Bustier en raphia brodé avec paillettes sur une jupe longue et drappé pour Vern...
Vern tout sourire....Elle porte désormais le pagne de son Epoux...
Avec les Mariés: Vianney ( Le Coq)et Vern ( La Poule)...NO COMMENT...
Avec Steeve, frère de la Mariée...C'est un chef de famille nucléaire, et un futur chef de clan...Vous ne le savez peut-être pas mais il a donné des conseils à sa soeur sur le mariage, puisqu'il est passé par là...
Avec le Grand-père que nous appellons afectueusement Tonton Faustin, père de la Mariée...On peut lire sur son visage quelque chose d'inscriptible...Le Lisez-vous?
C'est un homme très particulier. Il a honoré les siens morts depuis des années...Mon Père est mort en 1980, et Vern la mariée n'était même pas encore concue. Donc,aucun lien de vie n'existe entre la mariée et mon Père. Mais tonton Faustin a tenu à honorer la mémoire de son neveu (Mon Père) et l'associant à ce mariage. En effet, les cartons d'invitation mentionnaient des noms de défunts tels que mon Père Nzoubou David, Mytoulou Bernard...J'ai été très étonnée et émue de découvrir ces cartes d'invitations. Je suis curieuse culturellement. En me rapprochant de tonton Faustin, j'ai découvert un pan de ma coutume que je ne connaissais pas, je peux dire que j'ai pu entrevoir quelque chose que je ne peux expliquer et j'ai compris beaucoup de choses liées à la réalisation de la tenue traditionnelle de Vern.
Tonton Faustin m'a donc expliqué ceci: Suivez attentivement!
Dans l'ancien temps, le mariage chez nous se faisait à huit clos! Hé oui! Et cela se passait à la nuit tombée. Le mariage était célébré par les vivants et les morts qui selon la tradition ne sont pas morts, ils ont disparus! Or dans ma coutume le monde des morts et celui des vivants se rejoignent vers 18h. Pour que les défunts puisent assister au mariage, il faut le célébrer la nuit, du moins la sortie de la mariée. Ce mariage il l'a célébré avec ses disparus. Ils étaient là, présents! C'est pourquoi leurs noms figuraient sur les cartes d'invitations. D'ailleurs pour ceux qui ont assisté à la cérémonie, Tonton Faustin a mentionné les noms des siens disparus ( et non morts)
J'ai appris aussi de mon côté Obamba que lorsqu'on laisse tombe l'enclume, le bruit sourd que l'on entend on dit que ce sont ceux qui sont de l'autre côté qui acceptent! Alors tout se rejoint!
Juste pour vous dire quelque chose d'important: Harcelez les sages de vos familles, de vos clans pour qu'ils vous racontent votre histoire, votre source, vos coutumes.Vous comprendrez tellement de choses sur vous mêmes...
Je retiens que c'était un mariage chargé de symboles et surtout d'émotion. J'ai encore appris beaucoup de choses sur mes origines Ndassa-Bayumbu. Chaque individu est la somme culturelle et spirituelle de ses ascendants. Le métissage ethnique dont je suis issue ( Obamba-Bangwoué-Bakanigui-Ndassa-Bayumbu) est le constitutif majeur de ma personnalité.
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